Mr Hedi Jilani, patron des patrons tunisiens photo
Hormis quelques vieux militants, tenaces malgré les verrouillages politiques, les hommes d’affaires sont devenus les seuls défenseurs actifs de l’intégration maghrébine. Le cout du non-Maghreb, thème ressassé avec patience à chaque rencontre des hommes d’affaires, est, aux yeux de ces hommes d’affaires d’Algérie, du Maroc ou de Tunisie, est une aberration à traiter en priorité.
Avec un manque à gagner de 2 points de PIB annuel pour chaque pays (1 % représente plus de 10 milliards de dollars de valeur ajoutée), ce non-Maghreb relativise en effet de manière considérable la course aux IDE à laquelle se livrent les pays concernés. Des économistes considèrent qu’une intégration maghrébine sérieuse est de nature à générer une croissance de 1 à 4% avec des effets immédiat sur l’emploi d’autant qu’il s’agirait d’une croissance solide non dépendante des aléas de la conjoncture (cours du pétrole, pluviométrie).
La demande interne de Maghreb – par opposition aux demandes externes, européenne et américaine – est très naturellement portée par ceux qui ont le plus intérêt à sa réalisation rapide. En s’ignorant et en signant des accords de libre-échange avec des partenaires du nord, les pays gagnent-ils au change ?
Dans un récent séminaire organisé à Paris par l’IFRI (Institut Français des relations internationales, l’économiste algérien El Mouhoub Mouhoud, professeur d'économie à l'université Paris-Dauphine, a souligné que « le coût de la non-intégration Sud-Sud est plus élevé que celui de la non-intégration Nord-Sud ».
Le fait est, en dépit des discours de réclames que l’on entend dans chacun des pays, le Maghreb et les pays qui le composent ne font pas partie des zones émergentes. L’intérêt économique des pays concernés est moins de courir vers un renforcement des relations économiques avec l’Europe que d’œuvrer à une plus grande intégration maghrébine.
Regarder vers le nord en ignorant le voisin
Le scepticisme à l’égard de l’Union pour la Méditerranée ne relève pas que de l’objection politique au demeurant très importante. Ainsi que le note, Khadidja Mohsen-Finan, professeur de sciences politiques, « Un vrai projet méditerranéen n’a pas de sens si les pays du Sud continuent d’agir de manière fragmentée. Ces espaces cloisonnés et étriqués sont du reste très peu attrayants pour les IDE qui ont besoin de marchés larges et intégrés. Le Maghreb est aujourd’hui une petite région économique dont les pays regardent inlassablement vers le Nord et se désintéressent de leurs voisins ».
Le cout du non-Maghreb est en effet plus élevé que l’absence d’intégration avec l’Europe. L’affaire de l’Union pour la Méditerranée a montré qu’une grande partie de l’Europe ne considère pas qu’une intégration de la rive sud constitue une priorité européenne.
D’une rencontre à l’autre, d’un forum à l’autre – et cela sera sans doute redit lors de la conférence américano-maghrébines de l’entrepreneuriat prévue pour 29-30 octobre prochain – les hommes d’affaires maghrébins sont fascinés par l’extraordinaire potentiel existant dans la région pour peu que soient garanties la libre circulation des personnes, des marchandises et des capitaux. Les données sont en effet limpides et elles ont été livrées en mai 2009 lors du 1er Forum des hommes d’affaires maghrébins, à Alger. L’’Algérie met sur le marché européen 62% de ses exportations et en importe 58%, le Maroc réalise 60% de ses échanges avec l’Europe. 78% des exportations de la Tunisie vont vers l’UE et 72% de ses importations à partir de ce même marché. Par contraste, la moyenne des échanges commerciaux entre les pays du Maghreb ne dépasse pas les 3% alors que les échanges de ces mêmes pays sont de l’ordre de 70% avec l’Union européenne.
Pas de Maghreb sans démocratie ?
A la veille du second forum, tenue en mai 2010, M. Hédi Djilani, patron des patrons tunisiens (UTICA) se disait convaincu qu’un marché maghrébin ouvert existera bien, tôt ou tard. «Notre plus grand souhait c’est que la politique prenne enfin en considération la volonté des hommes d’affaires à créer l’Union du grand Maghreb» avait-il dit. La formule de reproche doux adressée aux politiques indique clairement les limites des hommes d’affaires maghrébins. S’ils sont convaincus que le Maghreb intégré profitera à tous, ils sont néanmoins trop dépendant du politique, y compris au Maroc ou en Tunisie, pour se permettre de critiquer ouvertement leurs gouvernements respectifs. La question démocratique qui se pose pratiquement dans les mêmes termes dans les pays du Maghreb empêche l’émergence d’une classe d’entrepreneurs autonomes. Tout comme elle entrave le Maghreb. Abdelhamid Mehri, porte-parole de la conférence historique de Tanger d’avril 1958, l’a déjà noté : « L’esprit profondément maghrébin de la conférence de Tanger, que les régimes œuvrent à étouffer, aurait, dans un contexte démocratique, créé des dynamiques permettant de dépasser le blocage. C’est pour cela que je dis que la démocratie et le Maghreb marchent de pair ». Les entrepreneurs qui continuent, vaille que vaille, à défendre la mise en place d’un marché maghrébin devront sans doute se résoudre à prendre le risque de faire de la politique…
Avec un manque à gagner de 2 points de PIB annuel pour chaque pays (1 % représente plus de 10 milliards de dollars de valeur ajoutée), ce non-Maghreb relativise en effet de manière considérable la course aux IDE à laquelle se livrent les pays concernés. Des économistes considèrent qu’une intégration maghrébine sérieuse est de nature à générer une croissance de 1 à 4% avec des effets immédiat sur l’emploi d’autant qu’il s’agirait d’une croissance solide non dépendante des aléas de la conjoncture (cours du pétrole, pluviométrie).
La demande interne de Maghreb – par opposition aux demandes externes, européenne et américaine – est très naturellement portée par ceux qui ont le plus intérêt à sa réalisation rapide. En s’ignorant et en signant des accords de libre-échange avec des partenaires du nord, les pays gagnent-ils au change ?
Dans un récent séminaire organisé à Paris par l’IFRI (Institut Français des relations internationales, l’économiste algérien El Mouhoub Mouhoud, professeur d'économie à l'université Paris-Dauphine, a souligné que « le coût de la non-intégration Sud-Sud est plus élevé que celui de la non-intégration Nord-Sud ».
Le fait est, en dépit des discours de réclames que l’on entend dans chacun des pays, le Maghreb et les pays qui le composent ne font pas partie des zones émergentes. L’intérêt économique des pays concernés est moins de courir vers un renforcement des relations économiques avec l’Europe que d’œuvrer à une plus grande intégration maghrébine.
Regarder vers le nord en ignorant le voisin
Le scepticisme à l’égard de l’Union pour la Méditerranée ne relève pas que de l’objection politique au demeurant très importante. Ainsi que le note, Khadidja Mohsen-Finan, professeur de sciences politiques, « Un vrai projet méditerranéen n’a pas de sens si les pays du Sud continuent d’agir de manière fragmentée. Ces espaces cloisonnés et étriqués sont du reste très peu attrayants pour les IDE qui ont besoin de marchés larges et intégrés. Le Maghreb est aujourd’hui une petite région économique dont les pays regardent inlassablement vers le Nord et se désintéressent de leurs voisins ».
Le cout du non-Maghreb est en effet plus élevé que l’absence d’intégration avec l’Europe. L’affaire de l’Union pour la Méditerranée a montré qu’une grande partie de l’Europe ne considère pas qu’une intégration de la rive sud constitue une priorité européenne.
D’une rencontre à l’autre, d’un forum à l’autre – et cela sera sans doute redit lors de la conférence américano-maghrébines de l’entrepreneuriat prévue pour 29-30 octobre prochain – les hommes d’affaires maghrébins sont fascinés par l’extraordinaire potentiel existant dans la région pour peu que soient garanties la libre circulation des personnes, des marchandises et des capitaux. Les données sont en effet limpides et elles ont été livrées en mai 2009 lors du 1er Forum des hommes d’affaires maghrébins, à Alger. L’’Algérie met sur le marché européen 62% de ses exportations et en importe 58%, le Maroc réalise 60% de ses échanges avec l’Europe. 78% des exportations de la Tunisie vont vers l’UE et 72% de ses importations à partir de ce même marché. Par contraste, la moyenne des échanges commerciaux entre les pays du Maghreb ne dépasse pas les 3% alors que les échanges de ces mêmes pays sont de l’ordre de 70% avec l’Union européenne.
Pas de Maghreb sans démocratie ?
A la veille du second forum, tenue en mai 2010, M. Hédi Djilani, patron des patrons tunisiens (UTICA) se disait convaincu qu’un marché maghrébin ouvert existera bien, tôt ou tard. «Notre plus grand souhait c’est que la politique prenne enfin en considération la volonté des hommes d’affaires à créer l’Union du grand Maghreb» avait-il dit. La formule de reproche doux adressée aux politiques indique clairement les limites des hommes d’affaires maghrébins. S’ils sont convaincus que le Maghreb intégré profitera à tous, ils sont néanmoins trop dépendant du politique, y compris au Maroc ou en Tunisie, pour se permettre de critiquer ouvertement leurs gouvernements respectifs. La question démocratique qui se pose pratiquement dans les mêmes termes dans les pays du Maghreb empêche l’émergence d’une classe d’entrepreneurs autonomes. Tout comme elle entrave le Maghreb. Abdelhamid Mehri, porte-parole de la conférence historique de Tanger d’avril 1958, l’a déjà noté : « L’esprit profondément maghrébin de la conférence de Tanger, que les régimes œuvrent à étouffer, aurait, dans un contexte démocratique, créé des dynamiques permettant de dépasser le blocage. C’est pour cela que je dis que la démocratie et le Maghreb marchent de pair ». Les entrepreneurs qui continuent, vaille que vaille, à défendre la mise en place d’un marché maghrébin devront sans doute se résoudre à prendre le risque de faire de la politique…
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