Depuis la désignation de M.David D.Pearce, en qualité d’ambassadeur des Etats-Unis, à Alger, en août 2008 (pour succéder à l’excellent Robert S. Ford, aujourd’hui ambassadeur à Damas), on constate que les relations algéro-américaines connaissent un développement important qui est appelé à se renforcer dans les années qui viennent.Contrairement à une idée reçue, les intérêts américains en Algérie ne s’épuisent pas dans l’exploitation par les sociétés US des ressources pétrolières et gazières algériennes. Et contrairement à une légende que d’aucuns accréditent non sans quelque perfidie, la coopération militaire entre les deux pays se limite à des manoeuvres conjointes en Méditerranée dans le cadre du partenariat Algérie / Otan. Il n’y a jamais eu de bases militaires US en Algérie, il n’y en a toujours pas et à aucun moment le projet d’en installer n’a effleuré l’esprit des uns comme des autres. En revanche, il est vrai que face à la menace grandissante que font peser sur l’intégrité du territoire national les attentats commis par l’Aqmi (11 de nos gendarmes viennent de tomber sous les balles de lâches terroristes), les deux pays s’efforcent de mutualiser (en essayant d’y associer, entre autres, le Niger, le Mali, le Tchad, la Mauritanie) leurs moyens logistiques et techniques pour organiser une riposte efficace au grand banditisme, à la criminalité organisée et à l’immigration clandestine. On oublie trop souvent que l’Algérie est le 2e pays d’Afrique par sa superficie et possède des frontières communes avec sept Etats, ce qui rend presque intenable la tâche de nos forces de sécurité. Ceci dit, la coopération algéro-américaine, à laquelle l’ambassadeur D. Pearce (parfait arabisant et grand humaniste) a donné une impulsion décisive depuis deux ans, vise à assurer le développement économique, social et scientifique de l’Algérie. Elle n’a pas d’autre objectif. L’Algérie, qui entend diversifier ses partenaires, considère désormais que sa coopération avec les Etats-Unis est fondamentale. On peut en prendre la mesure à travers les projets conçus dans le domaine économique et commercial, celui de la justice et celui de la recherche et de l’enseignement.La coopération économique et commercialeEn février 2010, une délégation de 24 entreprises US conduite par la secrétaire d’Etat adjointe au Commerce, Nicole Lamb-Hale, est venue prospecter le marché algérien et nouer des contacts avec des opérateurs économiques nationaux, hors domaine des hydrocarbures. De nombreuses opportunités d’investissement ont été inventoriées: électronique, industrie mécanique, pharmacie, ciments, réalisation de programmes de logements et d’équipements collectifs.Sous l’impulsion de Conseil des affaires algéro-US conduit par le dynamique et entreprenant S. Chouikh, l’Algérie et les Etats-Unis pourraient conclure sous peu un accord cadre dans les domaines de la coopération économique, cependant que les autorités algériennes se sont déjà engagées (par le truchement de l’ancien ministre de l’Investissement, H.Temmar), à créer un climat des affaires propice à l’épanouissement d’un partenariat durable et dense avec les Etats-Unis. De leur côté, les Américains font bénéficier, depuis 2007, les Algériens de leur système généralisé de préférences, ce qui permet à plus de 3000 produits algériens d’entrer sur le marché US en totale franchise douanière. Il appartient à présent aux entreprises algériennes d’apprendre à connaître la structure et le fonctionnement du marché US et surtout d’investir dans le conditionnement et l’emballage du produit.La coopération judiciaireElle est d’autant plus importante que notre pays est déjà signataire de nombreux accords internationaux permettant l’entraide judiciaire et instituant une véritable coopération dans les domaines de la prévention, de la détection et du transfert du produit du crime ainsi que dans celui de l’exécution des décisions de confiscation rendues par les juridictions étrangères. En cette période caractérisée par la prolifération de la macro et de la micro spéculations, de la rétention d’argent (fraudes fiscales et fraudes douanières) ainsi que la corruption, il était important que les deux Etats coopérassent étroitement dans le cadre d’un traité mutuel d’assistance juridique dont le champ d’application inclut l’entraide judicaire en matière pénale, les documents bancaires et l’accélération de procédures. Cet accord a été signé le 8 avril 2010. En outre, l’Algérie attend des Etats-Unis qu’ils l’assistent dans sa lutte contre la cybercriminalité. Contrairement à ce qu’a soutenu avec quelque légèreté une partie de la presse nationale, le pouvoir politique n’a pas inscrit sur son agenda le fichage des citoyens; en revanche, la préservation et la sécurisation des données informatiques deviennent de plus en plus urgentes, tant il est vrai que peu de personnes en Algérie sont conscientes des ravages que peut causer pour l’économie du pays, voire pour sa stabilité, les incursions criminelles des hackers qui opèrent aussi bien à l’étranger qu’en Algérie même.La coopération culturelle, scientifique et techniqueElle est appelée à se développer à mesure qu’une bonne partie de nos meilleurs universitaires et chercheurs s’initient à la connaissance et à la maitrise de la langue anglaise. Mais surtout, pour la première fois dans l’histoire de leurs relations avec les Etats-Unis, l’ensemble des pays arabes et musulmans s’apprêtent à accueillir, avant la fin de l’année 2010, des envoyés spéciaux dépêchés par la Maison-Blanche (dans le sillage du discours historique du président Obama au Caire, le 4 juin 2009) pour procéder avec eux à un inventaire de leurs besoins dans le domaine de la coopération scientifique et technique; il s’agira de nouer des partenariats auxquels s’associeront les administrations, les entreprises, les universités, les centres de recherche, les sociétés savantes et qui impliquera nécessairement les membres de la migration très hautement qualifiée de ces pays qui réside aux Etats-Unis. L’initiative US s’inscrit dans une stratégie globale dont l’Algérie pourrait tirer le plus grand profit, à condition qu’elle le veuille. Qu’il s’agisse des questions d’environnement, de changements climatiques, d’énergies propres et de substitution, de gestion de systèmes d’information, de lancement de start-up ou encore de mise à niveau des PME/PMI, il revient à la puissance publique algérienne, aux opérateurs économiques et aux acteurs culturels de proposer et définir avec leurs futurs partenaires US les voies et moyens qui permettraient enfin à l’Algérie de sortir progressivement mais sûrement du modèle rentier dans lequel elle continue de se confiner. Il serait hautement souhaitable que le démarrage de ce partenariat ait lieu sous la supervision de l’ambassadeur David D. Pearce, parfait connaisseur de la langue et de la culture arabes et grand ami de l’Algérie, qu’il a sillonnée d’est en ouest et du nord au sud, nouant des contacts avec les représentants des différentes couches de la population et s’enquérant des conditions de vie et de travail de chacun.L’ambassadeur Pearce n’a eu de cesse depuis son installation à Alger de «harceler» le département d’Etat et la Maison-Blanche pour faire admettre que l’Algérie était un grand pays, à l’avenir prometteur grâce aux immenses ressources humaines qu’il recèle, qu’il était une puissance régionale devenue incontournable sur toute question concernant la paix, la stabilité et la sécurité en Méditerranée et enfin un partenaire loyal des Etats-Unis. Reste aux Algériens à se saisir de cette opportunité historique pour s’engager, en étroite coopération avec les Etats-Unis, sur le chemin de la croissance et du développement durables dans tous les domaines.alimebroukine@yahoo.com
Ali MEBROUKINE