La verveine de Chekfa, reine des tisanes
Encore et toujours très consommée en Algérie, la verveine a assurément encore plus de "veine" à Jijel où elle a trouvé un terrain de prédilection à Chekfa, sa culture y étant de plus en plus pratiquée malgré l'invasion de bourses tisanières "made in". Dans les cafés elle occupe le haut du podium au milieu des consommations les plus demandées, parvenant même à détrôner Sa Majesté le café noir et le tout récent breuvage en vogue, l'infusion de "zindjabil" (gingembre). Les amateurs de verveine, cultivée un peu partout et plus particulièrement dans la région de Chekfa (sud de Jijel), reconnaissent les vertus de cette infusion, de loin moins nocive que le café. Dans la wilaya de Jijel, réputée à la fois touristique et agricole, la culture de la verveine n'a rien perdu de son influence dans les circuits du commerce de gros et de détail. Selon des données locales, elle est pratiquée sur une superficie de 204 hectares contre 32 hectares il y a une décennie. Cette plante se retrouve même "propulsée" à Blida et à Boufarik, selon un jeune originaire de Chekfa qui a vécu dans les environs de la ville des Roses où se serait également généralisée cette plante aromatique. En effet, l'antique localité de Moulay Chekfa, commune à caractère rural située à environ 40 km de Jijel, reste à ce jour un "royaume" de la verveine, cultivée de père en fils pour perpétuer des traditions ancestrales. De nombreux citoyens de cette commune tirent leurs revenus de cette culture de plein champ qui ne demande pas de grands efforts mais beaucoup d'eau et d'engrais fertilisants, selon des agriculteurs de la région. Les prédateurs de cette plante, l'araignée et l'oïdium (sorte de champignon), notamment, provoquent certes des altérations mais elles sont corrigées par des traitements spécifiques, assure un agriculteur du coin. Lors de journées "Portes ouvertes sur l'emploi" qui viennent de s'achever à Jijel, des jeunes qui se sont lancés dans la production de verveine ont fait part de leur intérêt d'exploiter ce créneau qui leur procure de substantielles recettes. Une jeune demoiselle, ingénieur chimiste de formation, a même réussi la gageure de breveter sa marque déposée, ce qui permet d'écouler son produit dans plusieurs régions du pays. Grâce à cet exemple, favorisé par le dispositif mis en place par l'Etat pour encourager et favoriser la création de micro-entreprises, la verveine, produit naturel, "bio" par excellence, fait de plus en plus d'émules dans cette région bien arrosée et aux terres fertiles. Un autre producteur de la région, basé dans cette même petite localité de Chekfa, active dans la production et le conditionnement de cette plante aux vertus médicinales curatives, exportée déjà depuis les années 1950 vers la France voire jusqu'aux lointains Etats-Unis comme en témoignent des documents d'archives (factures, correspondances...). Ce jeune manager qui a hérité en 1987 cette activité de son père, s'enorgueillit d'être le "timonier" dans ce créneau. Les quatre hectares de terre qu'il exploite au lieu-dit "Souk" dans sa commune de résidence et consacrés à cette plante, rapportent gros: environ 100 quintaux de cette plante sont récoltés chaque année. Le premier choix donne deux récoltes par an et le deuxième choix trois récoltes, a-t-il précisé. La production est écoulée dans son intégralité par un commerçant qui la conditionne et la place sur le marché national.
R.R.