Parlera-t-on un jour de la « construction de la Méditerranée » comme on parle aujourd'hui de la « construction de l'Europe »? Cela semble encore très loin, mais un rapprochement par réseau électrique et énergie renouvelable est en train de se profiler : Transgreen, Desertec et le projet solaire méditerranéen sont les maitres mots de cette évolution.Après avoir été annoncé en fin mai, le projet Transgreen a été officiellement lancé lundi 5 juillet par Henri Guaino, le conseiller spécial de l'Elysée, et Jean-Louis Borloo, le ministre français de l'Ecologie. Ce projet ambitieux prévoit de relier les réseaux électriques Européens à ceux de plusieurs pays d'Afrique du Nord, par moyen de câbles sous-marins posés dans la Méditerranée.
Ces interconnexions seraient au nombre de 5 ou 6, totalisant 5 gigawatts de capacité, rapporte le quotidien Les Echos. Une ligne est prévue pour relier le Maroc à l'Espagne, l'Algérie devrait être reliée à l'Espagne et la Sardaigne, la Sicile à la Tunisie et la Libye, une interconnexion devra être posée entre la Grèce et l'Egypte, et la Turquie devrait être reliée à Israël en passant par le Liban (voir photo ci-contre).
Le protocole signé lundi prévoit de créer une société chargée d'étudier la faisabilité du projet Transgreen. Treize entreprises sont signataires, dont les français EDF, Alstom, Areva, Atos Origin et Nexans. Pour le moment, l'investissement serait évalué à 8 milliards d'euros pour les lignes utilisant la technologie du courant continu, technologie qui réduirait largement les pertes de réseau. « Un aspect décisif pour des lignes de plus de 1 000 kilomètres », selon Les Echos. Le quotidien cite Augustin de Romanet, patron de la banque publique CDC, qui disait que des investisseurs du golfe ou d'Asie du Sud-Est sont intéressés par ces projets d'infrastructures, et que par conséquent, le financement, même s'il est important, resterait ainsi réalisable.
Transgreen, la CECA de mare nostrum?
Sans même attendre les résultats de l'étude de faisabilité, Jean-Louis Borloo parle déjà en termes élogieux du projet. Selon Les Echos, ce projet le ferait « un peu penser à la CECA », la Communauté européenne du charbon et de l'acier, première institution européenne et point de départ de la construction de l'Union des 27 telle qu'elle est connue aujourd'hui.
Une comparaison osée? Sur le principe, non. La CECA fonctionnait ainsi : prioriser des projets fonctionnels pour faire coopérer différents acteurs, divisés auparavant. L'intérêt économique de mettre en commun des économies de l'acier et du charbon a ainsi permis de surpasser des inimitiés datant de la Deuxième Guerre Mondiale. C'est sur cette base que l'intégration de l'Europe a pris forme pour investir de plus en plus de domaines. Et ce sont des projets communs structurant comme ceux de Transgreen et Desertec qui peuvent aujourd'hui entamer un processus de rapprochement entre les pays du pourtour de mare nostrum.
Mais sur le plan de la procédure, la manière d'avancer n'est pas encore bien mise au point. Plutôt que de coopération, certains parlent même d'une concurrence franco-allemande entre ce projet (Transgreen) et l'initiative allemande Desertec. Si sur ce plan, une complémentarité devrait s'établir avec le temps, il reste à savoir quelle sera la place des acteurs de la rive sud de la Méditerranée dans ces grands projets. Quelques entreprises marocaines participent déjà au projet Desertec, mais pour le moment, aussi bien Transgreen que Desertec se lisent comme une mise en commun des grands du marché européen.
Frederic Schmachtel Copyright Yabiladi.com
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