Facebook, "troisième Etat" de la planète
Facebook est désormais le troisième pays au monde derrière la Chine et l'Inde", clament les spécialistes des nouvelles technologiques. Le réseau social vient juste d'atteindre les 500 millions de membres actifs. Le site comptait 200 millions de membres en avril 2009, 300 millions six mois plus tard. La comparaison avec un Etat est évidemment exagérée. Le réseau social, société privée enregistrée aux Etats-Unis, n'est pas un Etat. C'est juste une plate-forme virtuelle sur laquelle les internautes peuvent se construire des profils, accéder et communiquer avec ceux des autres. Mais Facebook reste un véritable phénomène. Au point d'ailleurs qu'Hollywood vient de lui consacrer un film, Le Réseau social. Comment expliquer pareil succès ? Sera-t-il durable ?La plate-forme a été créée en 2004 par Mark Zuckerberg, encore étudiant à Harvard à l'époque et âgé de 20 ans, un an après MySpace, Last.fm, ou Orkut, et deux ans après Friendster. Ces réseaux sociaux ont tous connu le succès à un moment ou à un autre, ou le connaissent encore, mais pas dans les proportions de Facebook. MySpace, son principal concurrent, est en perte de vitesse : l'audience aurait diminué de moitié ces six derniers mois.
"Facebook a mieux réussi que les autres à interpréter les demandes des utilisateurs, surtout en termes de simplicité, en créant une interface riche permettant en peu de clics d'accéder à un monde de services qui d'habitude n'est pas à la disposition des utilisateurs lambda mais des experts (jeux, e-mail, chat, etc.)", estime Vincenzo Cosenza, spécialiste des réseaux sociaux et directeur de l'agence italienne de communication Digital PR. "C'est gratuit, simple et cela s'est énormément propagé parce que ce réseau a d'abord ciblé les étudiants pour leur permettre de correspondre entre eux. Plus récemment, les moins jeunes s'y sont également mis, et maintenant les habitants de pays non occidentaux", relève Christine Balagué, spécialiste des réseaux sociaux, professeur à l'institut Télécom.
Apparu alors que le phénomène des réseaux sociaux était en plein boom, Facebook a réussi à innover, proposant aux développeurs informatiques tiers d'adapter des programmes logiciels pour la plate-forme. Des milliers d'applications ont été rapidement disponibles pour les utilisateurs, leur permettant de personnaliser davantage leur profil ou de renforcer les liens avec d'autres (en éditant par exemple des listes de préférences, en jouant en réseau à des jeux, etc.).
Facebook a aussi réussi sa migration sur les téléphones mobiles intelligents. C'est la première application que téléchargent les détenteurs de ces terminaux. Or, dans quelques années, on utilisera plus son Smartphone pour accéder à Internet que son ordinateur.
Aujourd'hui, c'est l'effet de réseau qui marche à plein. Plus il y a d'inscrits, plus cela incite de nouveaux membres à rejoindre la communauté. La prochaine frontière, c'est le milliard de connectés. C'est celle que s'est fixée M. Zuckerberg. Ce palier pourrait être toutefois plus difficile à atteindre. Sa croissance dans les pays développés ralentit. Le réseau, d'origine américaine, a certes réussi à s'implanter dans des pays de cultures très différentes, comme les Philippines, Singapour ou la Malaisie. Mais dans les pays qu'il n'a pas encore colonisés, il y a des réseaux locaux dominants dont l'utilisation est bien entrée dans les moeurs, tels CV Kontakte et Odnoklassniki en Russie, Orkut (lancé par Google) au Brésil, Maktoob au Moyen-Orient. Il y a des pays historiquement très protectionnistes, comme la Corée, où le service Cyworld domine, et le Japon avec Mixi. Et enfin des pays où la censure empêche Facebook de s'implanter, comme le Vietnam, où le réseau social Zing s'impose, ou la Chine avec QQ.
Données personnelles
Parmi les autres fragilités de Facebook, figurent les problèmes liés au respect de la vie privée. Cette question est au coeur du modèle développé par M. Zuckerberg. Les internautes sont incités à décliner âge, sexe, lieu de résidence pour s'inscrire, puis toute leur intimité lors de leurs échanges avec leurs "amis" du réseau. Facebook va plus loin dans la connaissance de ses membres en étendant le Web social à des sites tiers. Une mine de données personnelles que le réseau social est prêt à monnayer auprès des annonceurs soucieux de cibler au mieux leur publicité.
Le groupe se refuse à donner son chiffre d'affaires mais il semble que le modèle publicitaire commence à porter ses fruits. Le cap du milliard de dollars de revenu annuel devrait être franchi en 2010. Mme Balagué ne croit pas que la question du respect de la vie privée soit de nature à déstabiliser le groupe. "Les internautes sont souvent très soucieux du respect de la vie privée quand on les interroge mais leur conduite en ligne contredit ces déclarations : beaucoup n'hésitent pas à s'épancher", souligne-t-elle.
Elle poursuit : "C'est vrai qu'il y a des gens qui commencent à se désabonner de Facebook, il y a aura un taux de désabonnement non nul, mais je ne crois pas que cela ira plus loin. Aujourd'hui, on a tant de contacts sur Facebook, tant de liens que c'est difficile d'en changer, aussi difficile que de changer de banque." Le danger viendra-t-il de Google ? Le moteur de recherche n'a pas réussi à imposer son réseau social, mais il réfléchit activement à une réplique à Facebook.
Cécile Ducourtieux avec Laurence Girard
Facebook est désormais le troisième pays au monde derrière la Chine et l'Inde", clament les spécialistes des nouvelles technologiques. Le réseau social vient juste d'atteindre les 500 millions de membres actifs. Le site comptait 200 millions de membres en avril 2009, 300 millions six mois plus tard. La comparaison avec un Etat est évidemment exagérée. Le réseau social, société privée enregistrée aux Etats-Unis, n'est pas un Etat. C'est juste une plate-forme virtuelle sur laquelle les internautes peuvent se construire des profils, accéder et communiquer avec ceux des autres. Mais Facebook reste un véritable phénomène. Au point d'ailleurs qu'Hollywood vient de lui consacrer un film, Le Réseau social. Comment expliquer pareil succès ? Sera-t-il durable ?La plate-forme a été créée en 2004 par Mark Zuckerberg, encore étudiant à Harvard à l'époque et âgé de 20 ans, un an après MySpace, Last.fm, ou Orkut, et deux ans après Friendster. Ces réseaux sociaux ont tous connu le succès à un moment ou à un autre, ou le connaissent encore, mais pas dans les proportions de Facebook. MySpace, son principal concurrent, est en perte de vitesse : l'audience aurait diminué de moitié ces six derniers mois.
"Facebook a mieux réussi que les autres à interpréter les demandes des utilisateurs, surtout en termes de simplicité, en créant une interface riche permettant en peu de clics d'accéder à un monde de services qui d'habitude n'est pas à la disposition des utilisateurs lambda mais des experts (jeux, e-mail, chat, etc.)", estime Vincenzo Cosenza, spécialiste des réseaux sociaux et directeur de l'agence italienne de communication Digital PR. "C'est gratuit, simple et cela s'est énormément propagé parce que ce réseau a d'abord ciblé les étudiants pour leur permettre de correspondre entre eux. Plus récemment, les moins jeunes s'y sont également mis, et maintenant les habitants de pays non occidentaux", relève Christine Balagué, spécialiste des réseaux sociaux, professeur à l'institut Télécom.
Apparu alors que le phénomène des réseaux sociaux était en plein boom, Facebook a réussi à innover, proposant aux développeurs informatiques tiers d'adapter des programmes logiciels pour la plate-forme. Des milliers d'applications ont été rapidement disponibles pour les utilisateurs, leur permettant de personnaliser davantage leur profil ou de renforcer les liens avec d'autres (en éditant par exemple des listes de préférences, en jouant en réseau à des jeux, etc.).
Facebook a aussi réussi sa migration sur les téléphones mobiles intelligents. C'est la première application que téléchargent les détenteurs de ces terminaux. Or, dans quelques années, on utilisera plus son Smartphone pour accéder à Internet que son ordinateur.
Aujourd'hui, c'est l'effet de réseau qui marche à plein. Plus il y a d'inscrits, plus cela incite de nouveaux membres à rejoindre la communauté. La prochaine frontière, c'est le milliard de connectés. C'est celle que s'est fixée M. Zuckerberg. Ce palier pourrait être toutefois plus difficile à atteindre. Sa croissance dans les pays développés ralentit. Le réseau, d'origine américaine, a certes réussi à s'implanter dans des pays de cultures très différentes, comme les Philippines, Singapour ou la Malaisie. Mais dans les pays qu'il n'a pas encore colonisés, il y a des réseaux locaux dominants dont l'utilisation est bien entrée dans les moeurs, tels CV Kontakte et Odnoklassniki en Russie, Orkut (lancé par Google) au Brésil, Maktoob au Moyen-Orient. Il y a des pays historiquement très protectionnistes, comme la Corée, où le service Cyworld domine, et le Japon avec Mixi. Et enfin des pays où la censure empêche Facebook de s'implanter, comme le Vietnam, où le réseau social Zing s'impose, ou la Chine avec QQ.
Données personnelles
Parmi les autres fragilités de Facebook, figurent les problèmes liés au respect de la vie privée. Cette question est au coeur du modèle développé par M. Zuckerberg. Les internautes sont incités à décliner âge, sexe, lieu de résidence pour s'inscrire, puis toute leur intimité lors de leurs échanges avec leurs "amis" du réseau. Facebook va plus loin dans la connaissance de ses membres en étendant le Web social à des sites tiers. Une mine de données personnelles que le réseau social est prêt à monnayer auprès des annonceurs soucieux de cibler au mieux leur publicité.
Le groupe se refuse à donner son chiffre d'affaires mais il semble que le modèle publicitaire commence à porter ses fruits. Le cap du milliard de dollars de revenu annuel devrait être franchi en 2010. Mme Balagué ne croit pas que la question du respect de la vie privée soit de nature à déstabiliser le groupe. "Les internautes sont souvent très soucieux du respect de la vie privée quand on les interroge mais leur conduite en ligne contredit ces déclarations : beaucoup n'hésitent pas à s'épancher", souligne-t-elle.
Elle poursuit : "C'est vrai qu'il y a des gens qui commencent à se désabonner de Facebook, il y a aura un taux de désabonnement non nul, mais je ne crois pas que cela ira plus loin. Aujourd'hui, on a tant de contacts sur Facebook, tant de liens que c'est difficile d'en changer, aussi difficile que de changer de banque." Le danger viendra-t-il de Google ? Le moteur de recherche n'a pas réussi à imposer son réseau social, mais il réfléchit activement à une réplique à Facebook.
Cécile Ducourtieux avec Laurence Girard
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