Wednesday, February 23, 2011
La BEI a pleinement rempli sa mission
Le bras financier de l'UE, plus que jamais
De notre journaliste Camille Leroux
Le président de la BEI, Philippe Maystadt, a présenté jeudi à Luxembourg et hier à Bruxelles un volume de prêt en décroissance marquant la fin progressive des dispositifs mis en place pendant la crise.
La BEI a pleinement rempli sa mission», se félicite Philippe Maystadt. La BEI a en effet livré un «effort exceptionnel temporaire» dès le dernier trimestre 2008 à la demande du Conseil européen afin de porter son volume de prêts de 48milliards d'euros en 2007 à 58milliards en 2008 et 79 milliards en 2009. «C'était un des éléments de la réponse européenne à la crise.» Le plus gros de l'orage passé, la BEI revient progressivement à ses volumes de prêts habituels avec 72milliards d'euros en 2010. «Sur deux ans, nous avons prêté 61 milliards d'euros de plus qu'avant la crise.» Soit 150 milliards d'euros, 11milliards de plus que l'objectif fixé par le Conseil et presque le triple du volume de prêts consenti par la Banque mondiale. Si l'institution maintient ses axes de financements (convergence, économie de la connaissance, PME, réseaux de transports, énergie et environnement), trois ont particulièrement bénéficié de cette inflation de prêts.
D'abord les petites et moyennes entreprises (PME), frappées de plein fouet par le tarissement du crédit en temps de crise. «Nous avons réalisé l'objectif fixé par le Conseil : 30milliards d'euros de prêts en trois ans», souligne Philippe Maystadt, à savoir 8,2 milliards en 2008, 12,6 en 2009 et près de 10 milliards en 2010. Avec deux conditions imposées aux banques bénéficiaires: les prêts aux PME doivent être constitués à parts égales par l'argent de la BEI et par celui de la banque; et ce prêt de la BEI doit conférer un véritable avantage soit par une diminution du taux d'intérêt, soit par un allongement de la durée du crédit. Plus de 160000 PME européennes ont bénéficié de cette mesure très prisée-la BEI a d'ailleurs prêté en 2010, 10 millions d'euros supplémentaires à ING Luxembourg, qui avait déjà utilisé les 25 millions alloués en 2009.
La BEI a aussi soutenu les «régions les plus touchées par la crise» en octroyant 2 milliards d'euros à la Grèce «pour lui permettre de financer la contrepartie nationale indispensable pour bénéficier de l'aide des fonds structurels», et 1,5milliard au Portugal. «Il ne s'agit en aucun cas de financer le budget de ces pays, nos prêts sont toujours liés à des investissements clairement identifiés», précise Philippe Maystadt.
Le climat, nouvelle priorité
Au-delà de la crise, la BEI a érigé comme «priorité transversale» de ses engagements la lutte contre le changement climatique, passant de 16 à 19 milliards d'euros entre 2009 et 2010, soit 30% de ses financements dans l'UE. Les technologies matures comme innovantes appliquées aux énergies renouvelables (essentiellement le solaire, l'éolien et dans une moindre mesure la biomasse) ont reçu 6 milliards d'euros de prêts. La BEI a également injecté 1,7 milliard d'euros dans la progression de l'efficacité énergétique via le programme ELENA d'assistance technique à la mise aux normes des bâtiments publics. Sans oublier les modes de transport comme le tram et le métro.
Cet engagement climatique s'exprime également hors de l'UE avec 2milliards d'euros de financements en 2010 et l'accroissement annoncé de son Mécanisme pour une énergie durable et un approvisionnement énergétique sûr à 4,5 milliards d'euros. Le Parlement européen a également voté jeudi dernier un mandat de 2 milliards d'euros pour l'action de la BEI pour le climat.
La BEI revendique enfin sa solidité financière après avoir pu lever 67 milliards d'euros sur les marchés l'an dernier, confortant sa note AAA et son titre de premier emprunteur multilatéral. L'accroissement de ses activités aboutit logiquement à un résultat net de 2,1 milliards d'euros en 2010 contre 1,6 milliard en moyenne avant la crise.
Incontournable
Institution relativement peu connue du grand public malgré ses 53 ans d'existence, la Banque européenne d'investissement a gagné en visibilité et en coopération avec les autres institutions européennes.
Confondue à tort avec la Banque européenne pour la reconstruction et le développement (BERD), la BEI bénéficie d'un mandat beaucoup plus étendu et qui tend à s'étoffer encore, de même que les attentes de l'UE en son endroit.
La stratégie Europe 2020
«La BEI apporte son financement et son expertise dans les axes prioritaires de la stratégie Europe 2020», indique Philippe Maystadt. À savoir la croissance intelligente, soutenable et inclusive. «Nous développons actuellement des instruments conjoints avec la Commission européenne en vue du budget 2014-2020.» Le président de la BEI veut s'inspirer du mécanisme de financement avec partage des risques (MFPR), introduit en 2007, et assurant un accès au crédit pour les projets de recherche, développement et innovation proposant des technologies complexes ou reposant sur des marchés entièrement nouveaux, dont le risque décourage les prêteurs traditionnels.
Le bras financier de l'UE en Méditerranée
La BEI est dotée d'un ensemble d'instruments d'intervention en faveur du développement économique et de l'intégration des pays partenaires méditerranéens par le biais de la Femip (facilité euro-méditerranéenne d'investissement et de partenariat). La BEI a ainsi déboursé 1,6 milliard en 2009 et 2,6milliards d'euros en 2010, répartis entre le Maroc, l'Algérie, la Tunisie, l'Égypte, Israël, le Liban, la Syrie, la Jordanie et l'ensemble Gaza/Cisjordanie.
La BEI, qui a versé 900 millions d'euros de prêts à l'Égypte et 500 millions à la Tunisie en 2010, s'est engagée, à la demande du Conseil européen, à accroître ses financements après les révolutions du Nil et de jasmin. «Il faut soutenir les projets favorables au développement économique et à la création d'emplois», souligne Philippe Maystadt, président de la BEI. «Il y a un risque de tension sociale si la transition ne répond pas aux attentes des jeunes.»
C'est dans ce contexte que le Parlement européen a voté, jeudi dernier, une rallonge d'un milliard d'euros du mandat extérieur de la BEI dédiée aux projets dans le bassin méditerranéen-une mesure que le Conseil européen doit valider à son tour. Philippe Maystadt estime pouvoir accélérer une quinzaine de projets en Tunisie et prêter 1 milliard d'euros, ce qui équivaut à soutenir au moins 2 milliards d'euros d'investissements puisque la BEI finance au maximum la moitié des projets. Pour l'Égypte, une dizaine de projets sont dans le «pipeline» selon le jargon de la BEI.
Quant à la Libye, si Catherine Ashton, la haute représentante de l'Union pour les Affaires étrangères et la politique de sécurité, s'est plusieurs fois entretenue avec Philippe Maystadt, ces jours-ci, sur la possibilité d'accompagner une éventuelle transition politique, la BEI ne peut agir en l'état actuel des choses puisque Tripoli ne fait pas partie de la Femip.
Une exigence accrue de transparence
Régulièrement accusée d'opacité (lire par ailleurs), la BEI clame aujourd'hui sa rigueur en termes de choix de projets. «Seuls 0,3% de nos prêts figurent sur une liste suivie de près, indique Philippe Maystadt. Nous intégrons de plus en plus les critères environnementaux, sociaux et de respect des règles sur les marchés publics.» La BEI mène également une «politique extrêmement stricte de lutte contre les "juridictions non compliant", qui n'appliquent pas les standards internationaux sur la lutte contre le blanchiment d'argent, le financement du terrorisme et la corruption», assure son président. La BEI a même introduit une clause de relocalisation lui permettant d'exiger d'un promoteur de transférer son établissement si celui-ci est enregistré dans un pays listé par l'OCDE et le GAFI (groupe d'action financière).
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