Saturday, March 12, 2011
L'Europe rejoint l'échappé de Mr le president Nicolas Sarkozy
L'Europe rejoint l'échappé Sarkozy
PAR MATTHIEU VERRIER
LE TEMPS FORT
C'est tout Sarkozy, ça. Dans sa gestion sur le dossier libyen, il y a son activisme habituel. Il y a des raisons de politiques intérieures avec des sondages à redresser. Il y a une envie de retrouver une stature présidentielle en occupant le terrain international. Il y a le besoin de combler le retard à l'allumage accusé dans les révolutions tunisienne et égyptienne. Il y a enfin la stratégie du coup d'éclat permanent.
Alors, notre président s'est avancé sur le devant de la scène européenne dès jeudi soir à la veille d'un sommet des Vingt-Sept. Il a d'abord reconnu les opposants libyens du Conseil national de transition (CNT). Puis, avec le Premier ministre britannique, David Cameron, il s'est prononcé en faveur d'« actions ciblées ».
Résultat : les chefs d'État et de gouvernement se sont retrouvés hier à Bruxelles dans un climat de discorde. Les Allemands ont regretté des positions solitaires de Paris et Londres. Plusieurs pays ont émis des réserves sur l'opportunité de reconnaître si vite le CNT et sur l'éventualité d'une intervention armée. Et l'Europe a offert une nouvelle fois une cacophonie inaudible, qu'il a fallu harmoniser dans la douleur.
Nicolas Sarkozy exploite une faiblesse de l'Europe. Un talon d'Achille connu de tous mais sans remède. L'Union ne parvient pas à bâtir une diplomatie commune. La nomination en 2009 d'une haute représentante aux Affaires étrangères n'y a rien changé. Certes, Catherine Ashton était jusqu'alors inconnue sur la scène internationale et très peu expérimentée. Mais la difficulté tient surtout dans la nature même de l'Europe, qui est une somme d'intérêts nationaux plutôt qu'une communauté de visions internationales.
Les positions divergentes finissent souvent par se neutraliser. Même les crises ne soudent pas le continent. Le rêve, sûrement trop naïf, d'une voix unique pour l'Europe, se fracasse sur la plupart des dossiers. L'échappée est alors peut-être la seule solution pour amorcer un mouvement. Nicolas Sarkozy l'a expérimentée lorsque la France présidait le Conseil européen, au second semestre 2008, s'emparant ainsi du conflit russo-géorgien. Londres l'a fait aussi avec son plan de sauvetage des banques. Et le peloton a suivi.
Hier, l'Europe a moins avancé que Nicolas Sarkozy ne souhaitait. Elle a reconnu le CNT comme un « interlocuteur légitime », appelé Kadhafi à abandonner le pouvoir et étudié « toutes les options », à condition qu'elles soient acceptées par l'ONU et la Ligue arabe. Le président français est sorti du sommet satisfait, la chancelière allemande sceptique.
La stratégie de l'échappée brusque les partenaires et oblige à aboutir à des annonces parfois creuses ou suffisamment vagues pour assurer le consensus.
C'est tout Sarkozy, ça. Mais c'est aussi tout l'Europe.
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